Notes sur l'exposition : Le mystère et l'éclat, pastels du musée d'Orsay (du 8-10-2008 au 1-02-2009 )
Extraordinaire exposition ! Riche et variée de pastels du 19eme siècle. Pour moi, d'abord la première véritable rencontre avec ce matériau.
Pastel = de la poudre sèche de pigment broyées + gomme et liant (eau & argile) puis séchée dans un linge et découpée avant séchage complet; La couleur est dans la main, entre les doigts : plus proche de la feuille et de l'image que le pinceau et ses poils : plus primitifs aussi et moins socialisé comme geste, moins médiatisé.
boite de pastels de Degas, exposée sous verre
C'est Manet qui met le feux aux poudres : avec son traitement des peaux des jeunes femmes, il décolle la poudre de leurs joues pour la faire venir sur sa feuille, pastel = cosmétique.
Et avec tendresse et appétit sensuel, il en fait une critique ironique et acerbe de ces femmes-pots-de-peinture. Pastel = cosmétiques / femme = poudre de pastel. Le sujet modifie et influencera désormais ce qu'est une image pour lui. Olympia en caoutchou, femmes en poudre, images comme masque et jeu de mascarade. le corps réel se cache SOUS l'image, il se protège dedans. L'image ne dit pas la vérité, elle la protège en la dissimulant.
Manet : Portrait de Irma Brunner, dit la Viennoise, 1880-82, pastel sur toile
Impressionnant effets de vitesse dans le flou et les traces du rose et des cheveux noirs : il dépose un filtre et un voile entre le modèle et notre regard final. Il expose le théâtre du maquillage. En contrepoint aux zones de flous monochromes et plates : les éclats que sont les lèvres et les yeux : des pointes, des cicatrices et des anus, de la chair saillante Vs la peau douce.
Manet, jeune femme nue
Manet ménage toujours des vides dnas la composition, autour du personnage, ainsi, il dilate et aère l'image assez lourde du pastel qui charge la surface et le papier : il met en jeu le poids et la verticalité et le problème matériel de la fixation de la poudre de pastel et de la poudre potentielle qui peut tomber au pied de l'image. Cette question de l'air et de la vaporisation est essentielle au sujet Pastel.
Maxime Thieffine, les niveaux de gris, 2008, image de la vidéo
Maurice Denis, les balayeurs (détail)
Madame Manet sur un canapé bleu (1874) : on dirait un clown déguisé, du James Ensor, des vétements qui ne lui vont pas, des chaussures noires trop grandes, des voiles et des tissus trop lourds et un être absent sous l'apparence. l'anti modèle, sa propre femme ! Un négatif de la vie de peintre, entre sa femme et ses modèles.
Odilon Redon_la coquille_1912
Autre maître du pastel : Degas : Chez la modiste, 1905-1910
cadrage très abstraits : qui nous emmène chez Kupka et dépeint une situation de socialité et d'artifice, un lieu d'atelier de production des artifices et du corps dissout dans l'artifice cosmétique.
cadrage très abstraits : qui nous emmène chez Kupka et dépeint une situation de socialité et d'artifice, un lieu d'atelier de production des artifices et du corps dissout dans l'artifice cosmétique.
Degas : étude d'un noeud de ruban
Jeff Koons, balloons, Berlin
Fragonard, les baigneuses, 1765
Degas, avec ses nus au pastel, retrouve Fragonard : la peau et ses pigments se diffusent dans les environs du corps : ils voltigent sur le linge, et les drapés blancs. Degas : café concert aux Ambassadeurs, 1885
Jeux d'éclairages directionnels et contrastes violents, le pastel est utlisé comme jeu avec l'éclairage public et artificiel sur les visages, crinollines et tulles et jupons des danseuses. Comme Lautrec et Seurat, Degas, au travers de ses images des spectacles annonce le pop art et aussi les futuristes : les foules des villes à la fête foraine.
Pour finir, une découverte : Lucien Levy-Dhurmer (1865-1953), symboliste tardif (années 20) mais original et extrème dans ses cadrages et ses presques monochromes, à la suite de Turner, Rysselberghe, Seurat.
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