Je découvre vraiment le travail d'Albert Oehlen grâce à la très belle exposition du MAMVP : "réalité abstraite". Oehlen expose des toiles peintes qui combinent différentes techniques d'applications, croisées et superposées : peinture à l'huile, collage d'impressions jet d'encre, coups de bombe vaporisés, coulures, application lente et épaisse, ou vive et caressante, avec les doigts ou divers pinceaux, selon divers mélanges ou en à-plats unis.
La toile n'est évidemment ni close sur elle-même ni un pur travail formaliste (comme l'écrit bêtement Dagen, parlant d'art pour l'art) mais bien au contraire le lieu de convergence de gestes courants aujourd'hui, dans les façons d'appliquer de la couleur (à la main ou via une imprimante), de projeter des images grands formats (Oehlen n'ignore pas le lien entre le format de ses toiles et les affiches publicitaires) ou dans sa façon d'inscrire ses productions dans le regard de ses contemporains. Oehlen travaille sur la zone délimitée de sa toile à comprendre, à dialoguer avec et à intégrer ce que notre oeil subit bon gré mal gré, ce mélange chaotique d'informations : entre lecture et vision fugace, entre observation et décodage.
La toile n'est évidemment ni close sur elle-même ni un pur travail formaliste (comme l'écrit bêtement Dagen, parlant d'art pour l'art) mais bien au contraire le lieu de convergence de gestes courants aujourd'hui, dans les façons d'appliquer de la couleur (à la main ou via une imprimante), de projeter des images grands formats (Oehlen n'ignore pas le lien entre le format de ses toiles et les affiches publicitaires) ou dans sa façon d'inscrire ses productions dans le regard de ses contemporains. Oehlen travaille sur la zone délimitée de sa toile à comprendre, à dialoguer avec et à intégrer ce que notre oeil subit bon gré mal gré, ce mélange chaotique d'informations : entre lecture et vision fugace, entre observation et décodage.
Il ne révolutionne rien, il continue Rauschenberg et De Kooning mais il fait le lien avec l'état actuel de notre regard et des techniques de production de masse ou amateurs des images. Il sait que ce déchainement d'information visuelle dans nos villes et notre quotidien peut etre pensé avec ce que ses ancètres ont fait dans le médium peinture, au travers de la gestualité de l'expressionisme entre autres. Oehlen n'est expressionniste que relativement à d'autres gestes qu'il travaille aussi (collage, stratification, zoome). Son coup de peinture efface mais souligne, zoome dans la publicité ou l'affiche qu'il a placé au centre de la toile avant de commencer. Son geste fait partie d'une stratégie optique et sensorielle. Le passé de la peinture/des peintres rejoint notre actulité de lecteurs/spectateurs du monde actuel : déchainement d'énergies et de libido, de couleurs et de morceaux de corps flottants ou agrégés sur des mots et des surfaces stratifiées. Notre cerveau plongé dans ce monde produit ce que d'autres ont produit seuls jadis dans leur atelier. Eux, avec leurs mains, nous, avec notre mémoire et notre corps en ville ou devant les médias. Notre cerveau danse à l'intérieur de lui-même (au milieu de visions, traces et émotions) comme Pollock jadis sur sa toile.
Il ne faut pas hésiter non plus à plisser les yeux pour changer la focale et jouer avec les échelles possibles de la toile, sa puissance synthétique (une structure bien visible dans le flou) et sa sensualité matérielle (visible de très près) alors que la distance moyenne, photographique serait celle du cérébral, du temps de lecture et de l'effort de discernement, de la promenade appliquée et de l'enfoncement progressif, passant du comprendre au voir.
Oehlen ralenti notre regard, il réfléchit nos excitations en les agissant autour et avec des sources hétérogènes. Je ne sais pas ce que veut dire le titre de sa dernière série largement exposée ici (FM) mais ce coté "ondes sonores" évoque clairement l'idée d'une matière visible et visuelle agie et traversée par une altérité, celle des ondes d'une autre nature (sonore et verbales) pour aboutir à une musicalité, à une rythmique corporelle de ses propres perceptions déposées sur la toile. Comme des électro-ancéphalogrammes, FM enregistre l'activité d'un cerveau relié à un corps face aux images. Le formalisme de sa peinture est donc une réponse politique et volontaire aux messages et aux flux; une réponse avec le corps et non avec des arguments cérébraux. Le bruit et la matière, la réalité physique des images comme réponse à leur puissance immatérielle, idéologique et fantasmatique.
A voir aussi : ses dessins noirs et blancs tout autre, ceux de 2009 encore : jeux cartographiques de calques transparents et de stratifications de lignes et de textures synthétiques à la Polke/Lichtenstein, entre gestes, typographie, synthèse informatique, motifs décoratifs et dessin d'ingénieurs.
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