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Portrait zero, 1961, wood, screws, rope |
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baby, 1962, acrylic on celotex in aluminium frame, 125 x 105 cm |
L'an
passé (2013) cet artiste est décédé et, honnêtement, ce fut à
ma grande indifférence. Ses sculptures en bois et formica me
semblent justes sympathiques mais lourdes et pseudo kitsch, ses Blps, les pilules plates
exposées/dispersées dans l'espace urbain ou muséal (la blague devenu monument absurde) me fatiguent et représentent pour
moi le pire de ce que peut être l'art contemporain. C'est récemment
en feuilletant le catalogue de l'exposition au Nouveau Musée National de Monaco, que j'ai changé mon regard en découvrant une
toute autre facette de cet artiste américain, dont nous ne
connaissons finalement que les “tubes”, qui je crois, sont des
malentendus, heureux pour sa carrière économique, qui l'ont fait
croiser les avant-gardes et fait jouer parfois au malin, alors qu'il
me semble être finalement un humble peintre de la texture du
quotidien, comme les hyper-réalistes ou Stephen Shore, Tatline ou Edouard Vuillard.
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Low Overhead, 1985 |
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untitled (potatoes 5), 1997, acrylic on celotex, wood frame, 134 x 81 x 6 cm |
A
mesure que le XXeme siècle s'éloigne, on voit mieux les oeuvres des
individus alors que les combats et manifestes idéologiques
disparaissent et s'auto-ridiculisent. Ainsi, comme pour Lucio
Fontana, on peut relativiser des figures trop vénérées et
néanmoins explorer leur singularité de goût et d'imaginaire, dans
leur irrégularité et leur non conformisme par rapport aux
idéologies esthétiques dominantes. Comme chez Stella ou Guston (pas
si éloigné de Artschwager), deux traitres au dogme moderniste,
c'est ce que j'aimerai partager ici avec une sélection personnelle
d'oeuvres graphiques et picturales d'Artschwager. Je précise qu'elle
datent autant des années 60 que des dernières années, et ne
correspondent donc pas à une periode d'immaturité ou de régression.
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Bowl of peaches on glass table, acrylic on celotex, metal frame, 1973, 49 x 63 cm |
RA
est né en 1923 d'une mère juive ukrainienne et d'un père allemand,
botaniste, qui a travaillé sur la pomme de terre (ceci aura un sens
en regardant les images), il a grandi dans l'état du Nouveau Mexique
(je le mentionne car je remarque d'innombrables artistes que
j'apprécie qui sont nés, vivent, sont passés ou sont morts dans
cet état, ce qui devrait donner lieu à un post sur ce blog
bientôt). Il a commencé l'art tardivement après une carrière de
dessinateur industriel et de photographe professionnel, avec sa
première expo à 42 ans en 1965, entre minimal et pop.
Il
a beaucoup dessiné et peint sur des panneaux de fibres d'isolation
(sur celotex, voir le visuel à la fin), ce choix du support lié à
la construction amène un rapport à l'espace domestique (il vénère
Vuillard, comme moi) ainsi qu'une fibre et texture qui apparaissent
dans le tracé et la matière picturale. Matière brillante,
matelassée, souple et compacte, fibreuse, volumineuse, l'image
possède donc toujours déjà un corps. Ses cadres, singuliers, me
fascinent, en métal (comme un velux dans une toiture, par rapport au
celotex) ou en bois, peint, biseautés, dénivelés, ses seuils
prolongent l'image dans l'espace physique du spectateur.
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light bulbs, 2007, charcoal, pastel, ink on handmade paper, 132,x,191,cm |
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untitled, 1962,acrylic on canvas, 115 x 155 cm |
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horizon with orange sky, 2007, pastel on paper, 63 x 96 cm |
Son
regard explore et plonge, il s'immerge dans la texture biochimique et
psychique des objets et de leur matière, que ce soit dans la fibre
alimentaire (les pommes de terre), les poils et cheveux, les couches
géologiques ou les ondes des veines du bois. Il explose aussi contre
le mur des chaises et autres formes de la série Splatter pour en
faire jaillir leur jus intime et leur faire cracher leur entrailles
atomiques. Sa première oeuvre inventoriée est un autoportrait en
pendu, réalisé à partir de chutes de bois, de visses et d'une
corde, comme un contre-relief de Tatline ou un assemblage cubiste.
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Chair/chair, 1987-90, red oak, formica, steel, cow hide |
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white table, 1988, acrylic on celotex, formica, wood frame |
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Splatter Chair, Table, Mirror, 2005, formica & acrylic on wood |
Puis
en regardant cette sélection d'oeuvres, on remarque plusieurs choses
: les rapports du haut et du bas, en terme de mise en espace et de
sujet : portrait suspendu et enfant au sol ou table vues en plongée,
ce qui se répète ensuite dans la logique de ses oeuvres, au mur ET
au sol ou passant de l'un à l'autre quand il jette et éclate les
chaises ou formes au mur, dans les angles, quand il confond le point
de vue sur le paysage (ses pastels), sensé être de loin en surplomb
et qui ressemble à une coupe géologique, donc vue du dessous ou
même ce dessus de porte trop bas (Low overhead) qui oblige donc à
se courber, à abaisser ce qui domine.
Les
rapports au liquide, à l'oralité et à la fluidité, et plus
globalement à la logique de mâchage/écrabouillage et de
transformation sont omni-présents. On connait ses meubles et
retables assez morbides mais ils penchent aussi vers le psychédélisme
et le morphing, un mouvement vivant de la matière. Son portrait de
bébé tenant un biberon de lait est frappant, dans l'association du
sol (bois de parquet) au blanc du lait qu'on retrouve en divers
oeuvres (patates qui s'écoulent, chaises tables et miroirs qui ont
fondu en éclatant, dessus de porte en pseudo marbre qui glisse). Son
gout d'ailleurs des couches compressées par le choix de ses
matériaux déjà industriellement machés/cuits/travaillés en fait
l'opposé de l'arte povera, et pourrait permettre de le placer finalement entre
Paul Thek, Kenneth Price et Haim Steinbach.
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desert growth, 2005, acrylic, pastel, fiber panel on soundboard |
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journal 2, 1991, formica & acrylique sur bois |
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Watermelon, 2008, pastel gras sur papier |
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Landscape with pond, 2011, pastel |
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Untitled, 1969, 71x71x16cm, rubberised hair |
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self portrait, 2003, acrylic on fiber panel, metal frame, 61x63cm |
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exemple de Celotex |
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